Isabelle Jordan

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Divorce, Séparation : Combien de temps faut-il pour s’en remettre?

C’est une question qui revient souvent. Un divorce, une séparation, une rupture, renversent toutes nos habitudes, bousculent nos croyances, modifient l’image que nous avons de nous-mêmes et celle que nous offrons au monde, à nos très proches, ou à nos cercles plus éloignés. Tous nos référentiels changent. Et c’est souvent extrêmement douloureux. Que ce soit pour celui qui est quitté ou pour celui qui prend la décision de partir. 

 

Les chagrins d’amour sont très bien décrits dans la littérature, au cinéma et plus récemment, dans les séries que nous regardons. Il n’y a pas d’âge. Des enfants sont parfois désespérés quand leur ami(-e) les quittent pour un (ou une) autre. Et des personnes très âgées rencontrent exactement les mêmes difficultés. Quand on est dedans, on a l’impression que cette douleur ne s’arrêtera jamais. Que l’on n'en sortira pas. Que jamais plus on ne retrouvera la capacité d’aimer quelqu’un d’autre. Et pourtant ! 

La courbe du deuil expliquée par une psychologue (Elisabeth Kubler-Ross)

Une psychologue suisse, Elisabeth Kübler-Ross (née en 1926, à Zürich) a beaucoup travaillé sur « les derniers instants de la vie ». Elle en a dégagé une théorie du deuil qui est aujourd’hui appliquée à tous les « chocs » qu’un individu peut subir. Et une séparation, un divorce, constituent un vrai choc. Voilà ce qu’elle en dit (dans son livre On death and Dying, 1969, Sur le chagrin et le deuil).

 

Dans le langage courant, un deuil se définit comme l’étape qui suit la mort de quelqu’un. Elisabeth Kübler-Ross élargit cette notion pour inclure toutes les pertes que chacun d’entre nous peut subir : perte d’un travail, perte d’une maison, perte de son conjoint ou de son amoureux, perte de son pays pour ceux qui doivent partir. Pour elle, le deuil est le cheminement universel que nous expérimentons lorsque nous sommes (brutalement) confrontés au choc d’une disparition.

Les 5 étapes après un choc, un grand chagrin ou une perte

D’après elle, nous traversons alors cinq étapes :

Le déni : « ce n’est pas possible, il va revenir », « ils vont revenir sur leur décision, ils ne peuvent pas me faire cela », etc. Le déni est essentiel. Il nous permet de rester debout, de faire face aux premiers effets du choc. 

La colère : une fois que l’on a compris que la perte était réelle, nous sommes en rage. Nous dénonçons l’injustice, le mauvais comportement, l’irresponsabilité. Tout y passe. Le chagrin et les peurs de ce qui va se passer sont tels, que l’on préfère les recouvrir d’une bonne dose d’agressivité.

Le marchandage/ la négociation : nous nous sentons tellement impuissants qu’une part de nous-même essaie de reprendre un peu de contrôle. Nous échafaudons des scenarios. « Si je perds dix kilos, ou si j’arrête de fumer, elle va changer d’avis », « je vais me rapprocher de son meilleur ami, cela va le rendre dingue », comme si nos actions pouvaient changer le cours des choses.

La dépression, la tristesse : qui sont inévitables. Il arrive un moment où nous sommes submergés par la tristesse. Nous la traversons. Certains d’entre nous sont pétrifiés. Ne mangent plus. Ne parlent plus. Ne sortent plus. Laisser cette tristesse s’exprimer peut aussi être une libération. 

L’acceptation : quand nous ne sommes plus ni tristes ni en colère, et que nous sentons moins la douleur, nous pouvons commencer à regarder la réalité. Accepter ne signifie pas « être d’accord », car la plupart des chocs que nous rencontrons sont par principe « inacceptables ». Accepter signifie accepter de regarder les faits, de regarder l’autre, la succession d’évènements. Juste tels qu’ils sont. C’est la dernière étape du « deuil ». 

 

Plus tard, Elisabeth Kübler-Ross a ajouté l’étape du pardon. Pardon à soi-même quand on a été dévoré par la culpabilité. Pardon à l’autre quand c’est un autre qui a été l’auteur de cette violence (la violence de la perte). Parfois, cela va même jusqu’à la reconnaissance d’un « cadeau caché » : « je n’aurais jamais repris ces études si… », « je n’aurais jamais imaginé que j’étais capable de … ». L’ultime étape étant celle de la sérénité. De la capacité à penser ou à raconter l’évènement sans être débordé par l’émotion.

 

Dans la réalité, ces étapes prennent du temps. Et tous ne les passent pas dans cet ordre. Parfois, la tristesse précède la colère. L’important, c’est de repérer que chacun de ces états est normal. Que tout le monde passe par là. 

 

Quant à notre question initiale : après un divorce, une séparation, combien de temps cela prend ? Il n’y a malheureusement pas de réponse. Certains mettent des années. D’autres moins. Ce qui est certain en revanche, c’est que ceux qui reforment un couple très rapidement (on en a vu qui se remettaient en couple une semaine après leur séparation !) ne se donnent pas le temps de digérer l’évènement. On ne peut pas franchir ces cinq étapes en quelques jours. C’est l’une des raisons pour lesquelles ces « nouveaux » couples rencontrent (souvent) des difficultés et ne durent eux-mêmes pas très longtemps. Sans parler des enfants et des membres du premier cercle, qui eux aussi doivent « faire leur deuil » et ne suivent pas forcément tous le même rythme. Alors soyons patients, même si c’est très difficile. Et optimistes, car on en sort, sans aucun doute !